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Alain Gautier : « Il existe un vivier de navigatrices »

© Vincent Curutchet - 

Alain Gautier - aujourd’hui team manager de l’IMOCA MACSF skippé par Isabelle Joschke - affiche un palmarès en solitaire remarquable. Il fait partie des rares marins à avoir remporté La Solitaire du Figaro et le Vendée Globe, pour ne citer que ces deux courses. C’est aussi un marin expérimenté en double, vainqueur de la transat en Figaro en 1996 aux côtés de Jimmy Pahun, et l’un des navigateurs de sa génération ayant le plus couru en double mixte ! Il revient sur sa victoire sur l’épreuve (devenue aujourd’hui Transat Paprec), son expérience du double mixte, ce nouveau tournant vers la mixité. Morceaux choisis. 

La victoire en 1996 

« Ma victoire sur cette course, c’est de très bons souvenirs : premièrement c’est toujours sympa quand on gagne la course, en plus avec un copain d’enfance [Jimmy Pahun, désormais député du Morbihan], avec un départ à la maison [à l’époque la course s’élançait de Lorient] et un nouveau sponsor, Brocéliande, avec qui j’allais ensuite commencer un projet en multicoque. Tout était donc aligné, l’histoire était très belle d’autant qu’il y avait eu, cette année là encore, un plateau exceptionnel avec un très haut niveau et une belle bagarre entre les premiers. Je me souviens notamment qu’on avait eu 5-6 jours de près en quittant Madère pour aller chercher une route nord. C’était assez étonnant et un peu désagréable mais ça avait fini par payer devant les frères Poupon qui eux étaient partis au Sud. Et puis je me souviens de l’arrivée… L’arrivée à Saint Barth, c’est quand même quelque chose de totalement incroyable ! »

Le double mixte

« Je suis plutôt bien placé pour parler du double mixte : j’ai beaucoup travaillé avec Ellen Mac Arthur, nous avons fait deux transatlantiques ensemble en Orma, et j’ai aussi fait pas mal de courses avec Isabelle Joschke sur différents supports et formats. Les femmes ont cette capacité de moins pousser à fond tout le temps le bateau. Ça s’observe d’ailleurs si l’on regarde les marins qui sont concernés par les avaries ou ceux qui terminent les courses. Cette manière de faire, de moins risquer de casser, de préserver la machine, c’est une très grosse qualité pour un marin. Ellen, par exemple n’avait pas beaucoup d’expérience en multicoque mais un feeling incroyable. On se connaissait déjà certes, mais la vie à bord avait été simple dès les premières courses et son talent avait émergé très rapidement même sur ce nouveau support. Je n’ai jamais vu de différence majeure entre naviguer avec un homme ou une femme. C’est surtout des petits détails, dans l’attention à l’autre par exemple mais dans ce cadre-là, une femme est un marin, une coéquipière, et je ne vois pas de distinguo.

J’aurais pu participer à la transat (aujourd’hui Transat Paprec) avec une co-skipper mais à l’époque exceptées Florence Arthaud et Karine Fauconnier, il n’y avait que très peu de femmes qui couraient. Je le regrette car elles ont souvent des qualités supérieures aux hommes mais il y avait différents freins, de toutes natures qui faisaient que les filles étaient moins présentes dans la course au large. C’est d’ailleurs toujours le cas.

Ce passage de la Transat Paprec en double mixte est une excellente nouvelle. Le plateau en 2023 sera peut-être un peu plus difficile que d’habitude à composer mais c’est une super dynamique qui paiera dans le temps.

Il existe un vivier de navigatrices, avec un bon bagage technique et/ou une connaissance du large comme par exemple pour celles qui participent à la Mini-Transat. L’épreuve permettra aux navigatrices qui feront le choix d’y aller de continuer à accumuler de l’expérience à très haut niveau. »